dimanche 28 février 2010

Une aventure incroyable à 0,35 centimes d'euros


S'« Il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous », comme l'a écrit Paul Eluard, alors j'ai un agenda de ministre. Imaginez que le jour où José Bové se déclare candidat aux présidentielles françaises, il vienne le soir-même vous en parler dans votre salon. C'est ce qui m'est arrivé en version burkinabé, ce qui défie donc l'imagination.
Presque chaque matin (et attention le « presque » a son importance), je me rends « Au bon Samaritain », le magasin d'alimentation du quartier où je loge, et qui a des écriteaux du genre « Que Dieu vous bénisse durant vos achats ». Là, il y a un « kiosque à journaux », une vieille étagère qui aligne la presse, entre le rayon des conserves et celui des crèmes de soin au beurre de karité. J'achète « Le Pays », quotidien à la qualité très inégale, mais dont les analyses en matière de politique africaine me paraissent pertinentes. Et là, pour 250 francs CFA (0,35 centimes), il va m'arriver une aventure incroyable.

En Une, avec une photo pleine page, le tout premier candidat indépendant vient de se lancer dans la course à l'élection présidentielle de novembre 2010 au Burkina. J'ouvre, et je lis qu'il vit à Liège depuis 14 ans. Là, j'ai un gros pressentiment, qui se précise puis explose à la lecture d'un détail de sa vie : je connais Maxime Kaboré, j'ai même ses coordonnées ! Selon Einstein, « Le hasard, c'est Dieu qui se promène incognito. » Et bien Dieu a pris le même vol Air-France Ouagadougou – Paris que le mien en mars dernier, parce qu'il a déposé sur le siège à côté de moi un Burkinabo-Liégeois fort sympathique, avec lequel j'ai causé pendant le vol.
Au pays de OuagaDisney, un pays où le « tripatouillage de la constitution » n'existerait pas, le futur président du Burkina pourrait être Liégeois, dêh ! J'imagine déjà le « Bon Samaritain » remplissant ses rayons de sirop de Liège et les maquis proposant des gaufres au sucre. Je contacte ma rédaction, qui me dit « fonce », et j'appelle Maxime. Mais comme on dit ici, il est devenu « Un grand quelqu'un. » Je prends donc tous les égards pour m'adresser à lui, et lui propose un rendez-vous « à sa meilleure convenance. » En bref, « C'est où tu veux quand tu veux », dit avec les formes, en espérant décrocher un rendez-vous dans la semaine. En Afrique, quand tu téléphones à quelqu'un, tu ne dis pas « Allô? », mais « On dit quoi ? » Moi, j'ai choisi la version européenne, mais j'ai eu des réponses de Burkinabé.
- Allô, Monsieur Kaboré ? C'est Charline du « Soir »...
- Ah Charline comment vas-tu ? Se voir ? Bien sûr, tu es où ? J'arrive dans une heure ! Et tu fais quoi ce soir ? Tu m'accompagnes au mess des officiers ?
(Le lieu où les officiers prennent leur repas ensemble.)
Et voilà mon candidat devant mon micro et un jus de fruit, sur la terrasse de l'endroit où je loge. Servi à domicile, bien frais sur un plateau.

2 commentaires:

  1. Sacrée Charline ! Toujours fonceuse !! Mais on choisit pas n'importe qui dis donc ! Faire les courses, boire une bière... puis rencontrer le futur président ! On s'emmerde pas là-bas ! ;)
    Il a eu un petit reportage au JT, il y a je pense une semaine, sur "ton homme" !

    RépondreSupprimer
  2. Charline, s'il existait un Oscar à la meilleur reporter/journaliste, il serait pour toi c'est sûr...et on te l'aurait donné hier soir, sur le tapis rouge habillée de beaux tissus Africains!
    And the Oscar goes to...Charline!!!
    Anna.

    RépondreSupprimer