lundi 1 mars 2010

"Ana" ralentit l'économie du Burkina


A 14 heures, comme tous les jours de la semaine à ce moment de la journée, les femmes ont déserté les rues et ont abandonné toute activité. Non pas pour la chaleur, qui pousse les hommes dans l'ombre des maquis (pour rappel, « les bars »), mais pour regarder « Les deux visages d'Ana », LE feuilleton qui rythme la vie des Burkinabais, sur la RTB (Radio Télévision du Burkina.) Comme on dit ici, « Ana, c'est pas petite affaire, dêh ! » Il s'agit d'une telenovela, un « soap latino », qui a pour héroïne Ana, une jeune mexicaine qui vit à Miami. Le doublage est digne d'une parodie des Inconnus. Bref, c'est davantage « Ca te barbera » que « Santa Barbara. » Mais le spectacle est devant l'écran : il faut regarder la tête de celles qui regardent la série. Et tendre l'oreille aux débats, parce qu'ici, c'est en groupe qu'on regarde « Ana. »

Mes copines S., F., et K. regardent la série à trois tous les jours. Elles se posent devant l'écran minimum cinq minutes avant le début, même si la RTB diffuse de la pub entre le générique et la première scène ! Et là, elles s'emballent déjà :
- C'est Irène ô ! Elle va dire à Raphaël qu'elle a perdu l'enfant dans l'accident de voiture !
- Ca c'est grave, dêh, surtout parce qu'elle va dire que c'est de sa faute à Raphaël.
- Ils vont rompre, là même. Irène elle est méchante ô.
- Et lui, comment il réagit, c'est chercher poux sur crâne rasé, dêh.
- Chuuut, taisez-vous, elle va lui dire !

Vendredi dernier, nous sommes allés manger un « foutou sauce graine »(pâte d'igname en boule, comme celle d'un pain pas cuit, avec une sauce dont je n'ai pas encore percé les mystères. Super léger quoi.) Une serveuse du maquis a allumé la télé, et là, les gens qui étaient assis loin ont pris leur assiette pour aller s'installer autour de l'écran. Notre copine S. n'a pas osé, mais on sentait son désarroi. « Allez S., vas-y on ne t'en voudra pas. » Elle a fait ni une, ni deux, et elle a embarqué son foutou pour mater « Ana les deux visages. » Ma copine M. qui est la seule blanche dans le bureau où elle travaille redoute 14h : « J'en peux plus ! Je me tape le feuilleton tous les midis parce que pas le choix, tout le monde regarde. » Note pour plus tard : commander mon plat au maquis avant 14 heures. Et ne pas téléphoner pendant le feuilleton à mes copines sinon ça va chauffer ô !

3 commentaires:

  1. Surtout, gardes moi un peu de foutou pour mon arrivée ;))

    Elena

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  2. Après le foutou, on est foutu... ou "toufou"... faut faire gaffe ! :D
    Sapristi, t'imagine notre Mimie nationale là-bas, à l'heure du feuilleton !!!!! Elle serait à son jeu ! Pas vrai !

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  3. J'aurai jamais imaginé les "telenovelas" mexicaines faire un boom en Afrique!
    Mais doublées style les Inconnus, ça doit etre enoorme.....et tout Burkina en mode pause en plus!

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